Nous sommes admiratifs devant le rythme et la qualité des productions de Rue Saint Ambroise. Nous avons déjà chroniqué plusieurs fois leurs numéros successifs et ne manquerons pas celui-ci qui réussit l’exploit de paraître malgré la COVID et de nous proposer 29 textes, pas un de moins, avec quelques noms déjà familiers aux amateurs et bien d’autres à découvrir.
Il n’est pas possible, bien sûr, de rendre compte de chaque nouvelle. Le critique un peu débordé assume donc son choix de commencer par la fin, c’est-à-dire par le texte de Nathalie Barrié à qui revient l’honneur (car c’en est un) de clore le recueil. Un dîner chez les Rickshaw ne ressemble pas tout à fait aux autres textes que nous connaissons de cet auteur mais il y a tout de même « un air de famille » et on se délecte de cet air empoisonné que respirent les protagonistes dont aucun sans doute n’aurait vraiment souhaité être là. Ils alignent les lieux communs à défaut de vrais échanges, mais tout le monde est persuadé d’entretenir une conversation de haut niveau et n’a que mépris pour les autres… C’est un peu la même chose chez Livia Léri, mais le contexte est différent et le ton plus en demi-teinte. L’héroïne, qui vient de s’expatrier du côté de Papeete, navigue sur un catamaran avec quelques personnes qu’elle ne connaît pas et n’a pas grande envie de connaître. Quoique le skipper ne manque pas de charme… De quoi oublier peut-être le presque grand amour qu’elle a laissé en France ? Pour ma part, j’ai été sensible aussi aux nouvelles humoristiques (ce n’est pas si fréquent et il est rare qu’elles soient aussi réussies), par exemple Des bêtes dans la tête d’Anne de Beauvillé, franchement déjanté et hilarant, ainsi que C’est toi ou le chien ! de Julien Raynaud. Dans un autre registre, j’ai aimé Une promesse de Jean-Thierry Tanakas, qui nous fait entrer avec grâce dans l’univers de Modigliani et Mers intérieures de Marie Potacq, où une jeune fille, traumatisée d’avoir vu sa mère pulvérisée sous ses yeux dans un attentat, renaît peu à peu à la vie par le truchement d’une psychanalyste pas comme les autres… Bref, et pardon à ceux que je ne nomme pas, ils sont trop nombreux et n’ont pas démérité pour autant, c’est un recueil d’une grande richesse et d’une grande variété, que vous pouvez découvrir pour la modique somme de 12 €. Franchement, c’est donné !
N° 47 de la revue Rue Saint-Ambroise
(actualisé le )