Pour un numéro sorti en pleins désordres « confinatoires », Brèves a fait très fort avec son opus 117. D’abord, c’est un joli petit bouquin, avec une très belle photo en couverture qui donne envie d’aller vite tourner les pages pour savoir ce que cachent ce titre énigmatique « Le monde dans un grain de riz » et le sous-titre un peu plus explicite « Micronouvelles chinoises ».
Des micronouvelles, qu’est-ce que c’est ? D’abord, il faut savoir que c’est une spécialité chinoise, même si on en relève des occurrences un peu partout dans le monde et à toutes les époques. Est-ce un format encore plus petit que les nouvelles « moyennes » dont on a l’habitude ? Oui, avec une norme autour de 3000 mots. Ajoutez-y obligatoirement « une chute soudaine et finale, peu de personnages, un sens critique aigu de la société, et beaucoup d’ironie » : voilà ce que vous verrez développé dans la 1e partie de ce n° de Brèves, qui est très didactique et l’on s’en félicite sur un sujet si mal connu de nous.
Donc pendant une quinzaine de pages, le lecteur ignorant s’informe, mais si par hasard il est omniscient, rien ne l’empêche, évidemment, d’aller tout de suite à la page 17 et de se régaler avec L’échelle, Ordiphage, et Une rencontre fortuite, trois micronouvelles très réussies, maniant avec brio l’art de la chute inattendue, en complet décalage avec l’histoire racontée. Puis la lecture se poursuit avec une alternance de nouvelles et de pages informatives ou explicatives et enfin, il nous reste cent pages, soit les 2/3 de l’opus, pour faire la connaissance du grand maître du genre LING Dingnian, dont Brèves nous offre à lire 12 nouvelles (traduites spécialement pour l’occasion), puis un portrait de l’auteur, portrait dans tous les sens du terme puisque le texte est illustré de fort belles photos. Déjà largement publiée au Japon et aux États-Unis mais méconnue en France, on peut dire en paraphrasant la 4ème de couverture que la micronouvelle en langue chinoise fait ici une entrée en fanfare en francophonie. Brèves mérite bien un bravo, surtout par les temps qui courent, si peu favorables à l’édition comme à tout ce qui touche à la culture. On mesure facilement l’énergie sans faille qu’il aura fallu à ses créateurs pour mener le bateau à bon port. Qu’ils en soient remerciés. Et quel meilleur remerciement que de souscrire un abonnement à la revue ?
N° 117 de la revue Brèves : « Le monde dans un grain de riz »