De Capucine à Veronica, dix-sept prénoms émaillent ces courtes nouvelles : moments de vie aux titres aussi variés qu’attrayants, comme volés en instantané à la réalité et qui, effleurant la surface des brèves rencontres entre le protagoniste et ses amours de passage, en révèlent davantage qu’ils n’ont l’air au prime abord. Si après une première discorde, une malédiction est déjouée grâce à la sensuelle Alice, on n’en fréquente pas moins la compagnie des spectres avec l’énigmatique Giuletta, puis le chemin de Dante avec la ténébreuse Monika. Et si les charmes du duende et de la fête infinie nous sont révélés par la jeune danseuse Guadalupe et une Kirsten refusant de vieillir, plus dure sera la chute avec l’inénarrable Océane (« Océane ou les charmes du siphon », bijou satirique à ne pas rater) puis au chevet de Sandrine, aussi forte que fragile, mais la gentillesse de Veronica agira sur nos plaies vives comme un baume final.
Impossible de citer ici toutes les protagonistes de cette galerie de portraits féminins vus par un séducteur pris à ses propres rets, éternel innocent devant les pièges et les esquives sans cesse renouvelés de la gent féminine. Quelles sont les victimes et quels sont les bourreaux ? La balance vacille irrésolument, détournant la trame trop facile du donjuanisme, et c’est là tout le charme de ces contes sur le thème « Tel est pris qui croyait prendre ». Au-delà du machisme et du stéréotype, et pour notre plus grand plaisir, la perplexité masculine reste entière. À l’abri des jugements hâtifs, un kaléidoscope se dessine, celui d’une femme plurielle, aux multiples facettes, qui s’opposerait à une femme imaginaire désincarnée.
Ignorant le double écueil du piédestal et du caniveau, le regard porté sur ces dix-sept femmes reste empreint de bienveillance, même si parfois pointe une douce revanche, procurée avant tout, on le devine et le prologue le confirme, par un acte d’écriture non dénué d’humour et d’autodérision.