Le recueil La Chambre, publié par les éditions du Soupirail avec le concours de la revue Zone critique, a sélectionné, parmi de nombreuses soumissions, six nouvelles d’auteurs talentueux et pour la plupart, inédits : Vanya Chokrollahi, Julie Martigny, Jean-Marie Palach, Marc Soustras, Antoine Tran et Nina Vanspranghe. On songe bien sûr à la fameuse chambre de Proust, cocon protecteur et berceau de son génie mais aussi espace internalisé, avalé en un lent travail de chrysalide, pour mieux libérer les ailes et les pensées intimes. L’image du sanctuaire est développée dans ces tranches de vie, d’où émane un parfum de mystère aussi. Pascal ne disait-il pas que le malheur de l’homme était de ne pas savoir demeurer en repos dans une chambre ? Si ces nouvelles effleurent ce thème – le monde du dedans s’oppose à celui du dehors, le temps et le lieu se rassemblent dans une même clôture – elles le font chacune de façon entièrement idiosyncratique. L’éditrice, dénicheuse de talents, commente avec justesse : « Une chambre cache toujours une antichambre, emplie de nos mémoires, de nos angoisses… ». Ce sont « les souvenirs, et les regrets aussi » d’une femme mûre que distille subtilement D’une chambre à l’autre de Marc Soustras. La Garde, d’Antoine Tran, évoque l’intérieur aussi étouffant que protecteur de la chambre matricielle permanente dans laquelle le protagoniste, qui pourrait être un cousin de Gregor Samsa, suit avec un intérêt plein de questionnement la progression des moisissures sur le papier peint. Ce sont des tonalités bien distinctes, conjuguant en alternance la mélancolie, l’extase et la solitude, que déclinent ces textes pour évoquer la dualité dedans/dehors et la suspension du temps.
La Chambre – collectif – éditions du Soupirail - 116 p. - 12 €
(actualisé le )