Ça commence si tristement que j’ai failli refermer le livre en me disant « Oh non, pas ça, pas en ce moment ! ». On voit en effet, dans la nouvelle éponyme, un homme tenter de disperser sur la plage par grand vent les cendres de sa mère, comme celle-ci le lui a demandé avant de mourir. Il est venu là pour ça. Mais bien des choses vont se passer, susceptibles de mettre à mal cette louable intention. Entre autres, l’irruption d’une nommée Linda, qui va un peu (beaucoup) changer la donne. Notre héros, qui avait la batterie affective à plat, se trouve tout à coup ragaillardi. Mais que va-t-il faire de ce brusque regain de forme ? Allez-y voir, ça vaut le déplacement et ça donne le ton général du bouquin.
Bien que Gilles Dienst soit – arrêtez-moi si je me trompe – relativement novice dans l’art difficile de la nouvelle, il maîtrise avec une grande aisance les lois du genre. Dès le 2e texte (Finir autrement), on bascule dans une histoire qui semble plus ou moins anodine mais se densifie peu à peu de manière inquiétante, voire angoissante, jusqu’à cette conclusion qui clôt le texte tout en développant son titre : « Ça ne pouvait pas finir autrement ». En effet, et ça fait froid dans le dos.
Et ça continue … De la boue dans les fibres se montre d’un cynisme réjouissant, Remontées acides est une excellente nouvelle, très bien construite avec une chute surprenante, etc. En prime, les huit nouvelles sont nettement différenciées, avec des personnages non interchangeables qui ont chacun leur univers mais un point commun : ils se tiennent, en le sachant ou non, au bord du gouffre. Certains y tombent (de profundis) ou plus fréquemment y font tomber les autres (il suffit parfois d’une légère poussée…). Très sincèrement, Gilles Dienst était né pour être nouvelliste. On attend la suite avec impatience.
Gilles Dienst – Le sens du vent Editions Quadrature, avril 2022, 131 pages, 16,90 euros