Sous le titre assez obscur Anges et bêtes (il n’est guère question ni des uns ni des autres dans ce numéro), voici revenue la revue Brèves qui s’est donné pour mission (entre autres) de publier régulièrement une anthologie permanente de la nouvelle. Ce numéro 113 est aussi éclectique que ses prédécesseurs et tout lecteur amateur de ce genre littéraire peut trouver à s’y satisfaire.
Nous avons aimé le cynisme de L’argent qui ouvre le recueil et renouvelle avec bonheur le thème du gigolo et de la cougar, laissant deviner que les rapports tarifés n’excluent pas une certaine tendresse mais incluent aussi une forme de désespoir. La Rencontre avec John Earthend, dans un tout autre registre, s’attache à évoquer les affres de l’écriture (« Écrire, écrire, écrire pour continuer à vivre ») quand l’inspiration s’en est allée. Le grand départ et la Lettre à Nabokov cultivent l’humour noir mais il faut attendre le dernier paragraphe pour le découvrir (bravo pour la chute dans les deux cas !) … et ainsi de suite. On ne peut citer toutes les nouvelles mais aucune ne démérite, chacune à sa manière. Mention spéciale à Sur un murmure, qui ravira les théâtreux et les amoureux d’Hamlet, et à Dans la cage, pour son ambiance à la fois poétique, métaphorique et très en prise sur le monde actuel. Et enfin, dans la rubrique « Relire », ne manquez pas Vieille poupée, un texte d’Henri Céard qui date… de 1887. On verserait volontiers quelques larmes sur le sort de la malheureuse poupée qui connaît le destin tragique de ceux et celles qui ont cessé de plaire. Tout le désespoir de vieillir seul et abandonné traverse ce texte, d’une terrible cruauté et d’une époustouflante modernité.
Anges et bêtes, n°113 de la revue Brèves
(actualisé le )