Alors je me suis mise à marcher, de Kim Fupz Aakeson, traduit du danois par Aude Pasquier, éd. La Joie de Lire, 144 pages, 13, 90 euros. À partir de 13 ans.

par LL

Dans le salon de sa maison, une jeune fille fait la rencontre fortuite de la nouvelle conquête de son père. Alors, elle lui parle de sa mère décédée, avec tant de chaleur et de regret que l’amoureuse s’éclipse : elle n’aura pas sa place dans leur vie solitaire.
Deux frères préparent le petit déjeuner de leurs parents, pour leur anniversaire de mariage. Après les avoir trouvés endormis et fortement alcoolisés, ils partagent ensemble le fameux déjeuner et choisissent de parler d’autre chose. Un père et son fils construisent une immense palissade autour de la maison sous le regard de la mère, qui vient d’être frappée par son mari. Une sorte de prison pour elle, en somme. Une mère et sa fille veillent au chevet d’un père agonisant. La jeune fille force sa mère à s’éloigner, le temps de se restaurer mais lorsqu’elles reviendront dans la chambre, le père sera parti... sans elles. Un garçon doit aider son père à abattre un arbre et, ce faisant, subit ses rodomontades, un autre profite de l’infidélité de son géniteur, qu’il a découverte, pour obtenir une autorisation de sortie malgré sa mère qui ne transige pas avec les règles...
Chacune de ces quatorze nouvelles retrace, avec grande pudeur, un moment fort dans la vie d’un adolescent ou d’une adolescente comme les autres. Force est de constater que leur existence n’est pas toujours rose et ressemble parfois à une farce tragique, une comédie presque sans mots, où les adultes ne jouent pas forcément le beau rôle - ils sont dépeints comme les voient les ados : hâbleurs, intrusifs, impuissants la plupart du temps et au final assez décevants. Par l’intermédiaire de l’écriture sans concessions mais non sans tendresse, on accompagne chaque personnage un petit moment, puis on l’abandonne car il n’y a rien à faire. Entre écriture blanche et nouvelles noires, l’auteur nous peint, sans le juger, un monde où les rapports humains ne vont pas de soi, aux antipodes de bien des thèmes rebattus par la littérature jeunesse. Un recueil fort, des histoires brèves qui donnent à réfléchir et à reconnaître... Un grand bravo à l’auteur - et à la traductrice, pour l’excellence de leur plume.